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Histoire de CC : le C. Myers & Son n'est pas un Kropp. Mais...
Lun 12 Sep 2022, 17:43
Ce très bel et très efficace C.Myers & Son 6/8, évidé sonnant à double émouture, nez rond et châsse synthétique, n'est pas un Kropp...
Pourtant, il y ressemble et pour cause : C.Myers & Son est l'entreprise de Charlie Myers, et son siège d'Athol Road 51, à Sheffield, deviendra celui de la Kropp Manufacturing Co Ltd en 1923 ; dans le cadre d'une synergie avec Osborne, Garrett & Co.1 dont le détail m'est inconnu à ce jour.
Car Kropp n'est en fait qu'une marque déposée par Osborne, Garrett & Co. Et l'objet de cette société étant - alors - la fourniture en gros de produits pour coiffeurs, elle n'a donc pas - ou plus - à proprement parler fabriqué de rasoirs sous la raison sociale énoncée ci-avant. Affirmation confortée par l'information recueillie lors des recherches à-propos du Joseph Elliot Celebrated Razor, et selon laquelle la Joseph Elliot & Son aurait - au moins un temps - produit le Kropp pour « un détaillant londonien » ( sic. ) Dans le même sens, les rasoirs de marque ELMO - également déposée par OG&Co. - étaient fabriqués à Solingen.
Par contre Charlie Myers, lui, est bien affûteur. Un excellent meuleur / affûteur semble t-il, qui travaillera notoirement pour Osborne, Garrett & Co. en cette qualité - au moins - à partir d'une date inconnue, mais dont on peut supposer qu'elle coïncide avec l'apparition systématique de la mention made and ground in Sheffield sur les Kropp.
Soit aux alentours de 1914, en tenant compte des implications économiques liées aux événements géopolitiques qui rendaient, par définition, le broyage en Allemagne - privilégié jusque là pour des raisons de coût de production, semble-t-il - impossible.
On peut par contre être formel quant à la suite puisque, désigné en qualité d'affûteur employé au recensement de 1911, Myers est repris à celui de 1925 en qualité de fabricant de rasoirs. Et que la raison sociale de son entreprise y est précisée : Kropp Manufacturing Co Ltd2.
Celle-ci est donc située au 51, Athol Road, siège d'une éphémère ( 1916 - 1923 ) coopérative Norton Cutlery Society Ltd. sur laquelle je reviendrai dans l'Histoire de CC suivante et qui laisse Myers en possession, lorsqu'il en fait l'acquisition au moment de la vente aux enchères, d'un outillage comprenant entre autres un moteur industriel à essence de 30 cv., quatre rectifieuses de rasoirs, des broches de polissage, ainsi qu'un matériel de forge complet.
Charlie Myers est donc, au moins à partir de ce moment, en mesure d'assurer de façon autonome tous les stades de la fabrication de rasoirs. Sous son nom, et sous la marque déposée Kropp3,4.
En 1933, il change la raison sociale de son entreprise et la Kropp Manufacturing Co Ltd devient la C.Myers & Sons "practical razors manufacturers". Faut-il y voir la fin de sa licence de fabrication du Kropp ? Il semble que non, et que la société ait continué de produire le Kropp jusqu'à sa disparition, mais dans un autre rapport commercial avec OG&Co5.
Les souvenirs dactylographiés de William Gordon Marriot Ragg décrivent ensuite la reprise par Ragg & son Ltd. - en 1977 - de C.Myers & Sons, qui demeurait alors, à ma connaissance, le dernier fabricant exclusif de rasoirs droits à Sheffield. Cette production cesse la même année à l'occasion d'un changement de site.
DATATION DU RASOIR...
La datation de l'exemplaire concerné est, comme souvent, moins simple qu'il y paraît : les sources primaires disponibles sur le web concernant le fabricant et ses produits en tant que tels étant fort rares, il reste à effectuer un tri sans a priori - dans quelque sens - des multiples sources secondaires ; et à aller creuser le maillage industriel de Sheffield pour y trouver parfois le détail qui éclaircit.
Ainsi, C.Myers & Sons n'est pas C.Myers & Son : en tenant compte de la présence ou non de ce pluriel, l'estimation large va passer de 1911 - 1977 à 1911 - 1933.
À quoi l'on m'objectera que le marquage des soies peut ne pas avoir été modifié. Ce qui reste une possibilité dont il faudra tenir compte, même si l'on peut y opposer que ce détail - familialement symbolique qui plus est - dans la modification de la raison sociale a été respecté sur les boîtiers ; et que ces marquages ont aussi, si ma mémoire est bonne, une importance fiscale avec laquelle ces messieurs en manchettes du Trésor britannique ne plaisantaient sans doute pas davantage que leurs actuels et très informatisés successeurs.
Mais une autre donnée, moins vulgarisée, vient quant à elle fragiliser la datation basse à 1911.
Retenue parce que Charlie Myers est à cette époque recensé en qualité d'ouvrier / employé, cette qualification ne rend pas compte du statut particulier des artisans spécialisés qui sont souvent, et pour utiliser un terme contemporain, de faux-indépendants louant des emplacements tout ou partie équipés aux entreprises pour lesquelles ils travaillent en fonction des commandes. Voire de réels indépendants, disposant alors de leur propre atelier, dans lequel une production autonome est manufacturée parallèlement aux travaux de commande.
L'illustration ci-dessous, qui nous montre l'atelier de Cadman, témoigne à suffisance qu'il pouvait s'agir d'installations domestiques : habitation avec une cour et/ou une annexe, dans laquelle se trouvait l'atelier.
À l'appui d'un statut d'indépendant pour Myers, on a vu par ailleurs qu'il réalise la finition du Kropp dès lors que les opérations y afférant ne sont matériellement plus réalisables en Allemagne. Au risque de me répéter, rien ne permet d'affirmer qu'il en a le monopole dès le départ. Mais le fait est qu'Osborne, Garrett & Co. n'est alors pas ou plus - si elle l'a jamais été - en mesure de louer alors des emplacements de travail équipés, puisqu'elle commercialise des produits manufacturés par des sous-traitants et portant ses marques.
L'objet lui-même présente quelques détails pouvant aider à s'y retrouver. Pouvant...
… CE QUE L'OBJET RACONTE
Le made and ground in Sheffield Eng. désigne ainsi, sauf exception impossible en l'occurrence, une postériorité aux McKinley Tariff Act et première version de l'Agrément de Madrid. La présence du made (…) in précise en fixant - a priori6 - la période de manufacture postérieurement à 1914, suite aux nouvelles dispositions du Tariff Act entrées en vigueur cette année-là.
On remarque par la même occasion que la mention d'origine England est abrévié en Eng. N'ayant à cette heure rien trouvé qui traite de ce aspect, j'aurais tendance à privilégier l'antériorité de l'abréviation sur la mention intégrale vue ailleurs - alors reprise, elle aussi, en deuxième ligne du cartouche et non sur une éventuelle troisième ligne - pour des motifs techniques. Mais ça reste une hypothèse.
Quoi qu'il en soit, à l'examen attentif, ce qui frappe surtout c'est la qualité de finition. Je n'ai ainsi retrouvé sur aucun des Kropp7 l'effet de miroir en triangle que l'on peut remarquer dans le montage comparatif ci-dessous qu'il est beau :
qui constituerait dès lors une manière de signature ? Car elle n'est pas habituelle non plus sur les autres productions de la C. Myers & Son, tous modèles et époques confondus8.
Les stries de prise en main, tant inférieures que supérieures, sont quant à elles d'une régularité sans faille sur toute leur longueur. Mais hélas, ça non plus ne veut pas dire charrette : si les années '20 sont souvent retenues pour dater l'apparition de ce niveau de finition, on rencontre des CC antérieurs aussi bien servis et, surtout, des factures postérieures bien plus bâclées.
Notons aussi que la lame du Myers est plus courte de ~ 5 mm. tandis que le poids global est, quant à lui, supérieur de ~ 10 gr.
Autre indication, parmi les productions que j'ai pu visualiser il en est portant la mention hand forged (…) en lieu et place du made and ground (…) Il est permis de penser que la seconde s'est imposée avec l'obtention de la sous-traitance du Kropp.
Au bout du compte, si je veux la jouer ceinture, bretelles et corde à ballot : faute de source primaire et d'élément datant à coup sûr, force est de situer la manufacture de ce nouveau Sheffie à l'écurie dans une large marge comprise entre 1914 et 1977. Ce qui équivaudrait, en fait, à ne pas le dater...
Mais si je me contente d'un bonne ceinture, bien que le vendeur - qui est une boutique spécialisée de Londres ayant pignon sur rue - le place dans les années '20 je serai pour ma part plus circonspect, en le situant plutôt dans la période charnière pour l'entreprise qu'auront été les années '30. Suffisamment d'éléments concordent pour y inciter, avec les réserves qui s'imposent, sans faire preuve d'une coupable légèreté me semble-t-il.
À l'usage, ce Sheffie NOS venu d'Angleterre est tel qu'il se doit : c'est vraiment un excellent rasoir, en dépit d'une sous-cote sur le marché qui m'arrange bien. La coupe est franche et, après une petite reprise sur coticule / toile / cuir, toute en douceur. Très, très, agréable à utiliser.
Voilà voilà : je crois qu'on a fait le tour. Et vais bien entendu conclure comme d'habitude en rappelant qu'en dépit des croisements de sources et autres vérifications revérifiées, des erreurs peuvent s'être subrepticement glissées dans cette manière d'étude. Si vous deviez en repérer l'une ou l'autre, n'hésitez pas à me le signaler.
En espérant vous avoir apporté quelque chose, je vous remercie pour votre attention et vous donne rendez-vous tout prochainement pour l'Histoire de CC du Norton, point médian de la trilogie
---oooOooo---
NOTES
1 Contrairement à ce qu'on peut lire sur plusieurs sites / fils de discussion, Osborne, Garrett & Co. ne met pas la clef sous le paillasson en 1923. Peut-être se restructure-t-elle cette année là ; mais quoi qu'il en soit elle va poursuivre des activités jusqu'en ~ 1986
2 Là, les choses ne sont pas claires quant à l'exclusivité puisque sur les semainiers Kropp que j'ai pu découvrir on lit systématiquement un pluriel - Kropp Manufacturing Co's - qui pourrait indiquer un ensemble de compagnies sous-traitant une fabrication sous licence. Il est toutefois consensuel d'affirmer que Myers aura, en tout cas, été le dernier fabricant du Kropp. Le genre de chose qu'il faudra(it) creuser dans une étude consacrée spécifiquement au Kropp.
3 Qui est toujours restée semble-t-il propriété d'Osborne, Garrett & Co. comme tendrait à en attester une photo visible sur la banque d'images Alamy et prise à Londres ( Soho ) en 1972, où l'on découvre une plaque de façade annonçant : « Proprietors of the world famous Kropp razor ». Soho où est implanté le siège d'OG & Co. ( frith street 51 - 55 ). Relevons qu'en l'occurrence il est bien question de propriétaire et non de fabricant.
4 Ce genre d'association n'était pas exceptionnel, les produits portant la marque du fabricant bénéficiant alors du réseau de distribution de son commanditaire.
5 L'analyse des publicités - depuis toujours à prendre avec des pincettes, mais... - permet d'y voir apparaître, a partir de cette date, une mention : « the hand made of a master cutler » beaucoup plus restrictive que les « english manufacture » et autre « all british » exclusivement en vigueur jusque là.
6 Le made and ground in Sheffield Eng. est un peu ambigu, en ce sens qu'il peut avoir anticipé la nouvelle règle sans le vouloir, par simple volonté commerciale de se démarquer des ground in Hamburg et made in Sheffield, ground in Hamburg antérieurs. Ceci dit, on a vu que 1914 reste une date fort crédible à ce niveau également.
7 Je n'en ai guère visualisé que qu'une grosse centaine, il est vrai…
8 … c'est là que le gars se surprend à rêver qu'il possèderait peut-être bien une rare lame passée par les mains de Charlie Myers himself...
---oooOooo---
SOURCES
Iconographie :
SteveHB ( sur sheffieldhistory )
Neil Miller ( sur sharprazorplace )
Sites web :
https://birminghamhistory.co.uk
https://companysearchesmadesimple.com
https://forum.mens-only.gr
https://genuki.org.uk
https://gracesguide.co.uk
https://hawleysheffieldknives.com
http://moulinafer.free.fr
https://sharprazorpalace.com - avec un grand salut à la mémoire de feu Neil Miller
https://sheffieldhistory.co.uk
https://fr.wikipedia.org
Pourtant, il y ressemble et pour cause : C.Myers & Son est l'entreprise de Charlie Myers, et son siège d'Athol Road 51, à Sheffield, deviendra celui de la Kropp Manufacturing Co Ltd en 1923 ; dans le cadre d'une synergie avec Osborne, Garrett & Co.1 dont le détail m'est inconnu à ce jour.
Car Kropp n'est en fait qu'une marque déposée par Osborne, Garrett & Co. Et l'objet de cette société étant - alors - la fourniture en gros de produits pour coiffeurs, elle n'a donc pas - ou plus - à proprement parler fabriqué de rasoirs sous la raison sociale énoncée ci-avant. Affirmation confortée par l'information recueillie lors des recherches à-propos du Joseph Elliot Celebrated Razor, et selon laquelle la Joseph Elliot & Son aurait - au moins un temps - produit le Kropp pour « un détaillant londonien » ( sic. ) Dans le même sens, les rasoirs de marque ELMO - également déposée par OG&Co. - étaient fabriqués à Solingen.
Par contre Charlie Myers, lui, est bien affûteur. Un excellent meuleur / affûteur semble t-il, qui travaillera notoirement pour Osborne, Garrett & Co. en cette qualité - au moins - à partir d'une date inconnue, mais dont on peut supposer qu'elle coïncide avec l'apparition systématique de la mention made and ground in Sheffield sur les Kropp.
Soit aux alentours de 1914, en tenant compte des implications économiques liées aux événements géopolitiques qui rendaient, par définition, le broyage en Allemagne - privilégié jusque là pour des raisons de coût de production, semble-t-il - impossible.
On peut par contre être formel quant à la suite puisque, désigné en qualité d'affûteur employé au recensement de 1911, Myers est repris à celui de 1925 en qualité de fabricant de rasoirs. Et que la raison sociale de son entreprise y est précisée : Kropp Manufacturing Co Ltd2.
Celle-ci est donc située au 51, Athol Road, siège d'une éphémère ( 1916 - 1923 ) coopérative Norton Cutlery Society Ltd. sur laquelle je reviendrai dans l'Histoire de CC suivante et qui laisse Myers en possession, lorsqu'il en fait l'acquisition au moment de la vente aux enchères, d'un outillage comprenant entre autres un moteur industriel à essence de 30 cv., quatre rectifieuses de rasoirs, des broches de polissage, ainsi qu'un matériel de forge complet.
Charlie Myers est donc, au moins à partir de ce moment, en mesure d'assurer de façon autonome tous les stades de la fabrication de rasoirs. Sous son nom, et sous la marque déposée Kropp3,4.
En 1933, il change la raison sociale de son entreprise et la Kropp Manufacturing Co Ltd devient la C.Myers & Sons "practical razors manufacturers". Faut-il y voir la fin de sa licence de fabrication du Kropp ? Il semble que non, et que la société ait continué de produire le Kropp jusqu'à sa disparition, mais dans un autre rapport commercial avec OG&Co5.
Les souvenirs dactylographiés de William Gordon Marriot Ragg décrivent ensuite la reprise par Ragg & son Ltd. - en 1977 - de C.Myers & Sons, qui demeurait alors, à ma connaissance, le dernier fabricant exclusif de rasoirs droits à Sheffield. Cette production cesse la même année à l'occasion d'un changement de site.
DATATION DU RASOIR...
La datation de l'exemplaire concerné est, comme souvent, moins simple qu'il y paraît : les sources primaires disponibles sur le web concernant le fabricant et ses produits en tant que tels étant fort rares, il reste à effectuer un tri sans a priori - dans quelque sens - des multiples sources secondaires ; et à aller creuser le maillage industriel de Sheffield pour y trouver parfois le détail qui éclaircit.
Ainsi, C.Myers & Sons n'est pas C.Myers & Son : en tenant compte de la présence ou non de ce pluriel, l'estimation large va passer de 1911 - 1977 à 1911 - 1933.
À quoi l'on m'objectera que le marquage des soies peut ne pas avoir été modifié. Ce qui reste une possibilité dont il faudra tenir compte, même si l'on peut y opposer que ce détail - familialement symbolique qui plus est - dans la modification de la raison sociale a été respecté sur les boîtiers ; et que ces marquages ont aussi, si ma mémoire est bonne, une importance fiscale avec laquelle ces messieurs en manchettes du Trésor britannique ne plaisantaient sans doute pas davantage que leurs actuels et très informatisés successeurs.
Mais une autre donnée, moins vulgarisée, vient quant à elle fragiliser la datation basse à 1911.
Retenue parce que Charlie Myers est à cette époque recensé en qualité d'ouvrier / employé, cette qualification ne rend pas compte du statut particulier des artisans spécialisés qui sont souvent, et pour utiliser un terme contemporain, de faux-indépendants louant des emplacements tout ou partie équipés aux entreprises pour lesquelles ils travaillent en fonction des commandes. Voire de réels indépendants, disposant alors de leur propre atelier, dans lequel une production autonome est manufacturée parallèlement aux travaux de commande.
L'illustration ci-dessous, qui nous montre l'atelier de Cadman, témoigne à suffisance qu'il pouvait s'agir d'installations domestiques : habitation avec une cour et/ou une annexe, dans laquelle se trouvait l'atelier.
À l'appui d'un statut d'indépendant pour Myers, on a vu par ailleurs qu'il réalise la finition du Kropp dès lors que les opérations y afférant ne sont matériellement plus réalisables en Allemagne. Au risque de me répéter, rien ne permet d'affirmer qu'il en a le monopole dès le départ. Mais le fait est qu'Osborne, Garrett & Co. n'est alors pas ou plus - si elle l'a jamais été - en mesure de louer alors des emplacements de travail équipés, puisqu'elle commercialise des produits manufacturés par des sous-traitants et portant ses marques.
L'objet lui-même présente quelques détails pouvant aider à s'y retrouver. Pouvant...
… CE QUE L'OBJET RACONTE
Le made and ground in Sheffield Eng. désigne ainsi, sauf exception impossible en l'occurrence, une postériorité aux McKinley Tariff Act et première version de l'Agrément de Madrid. La présence du made (…) in précise en fixant - a priori6 - la période de manufacture postérieurement à 1914, suite aux nouvelles dispositions du Tariff Act entrées en vigueur cette année-là.
On remarque par la même occasion que la mention d'origine England est abrévié en Eng. N'ayant à cette heure rien trouvé qui traite de ce aspect, j'aurais tendance à privilégier l'antériorité de l'abréviation sur la mention intégrale vue ailleurs - alors reprise, elle aussi, en deuxième ligne du cartouche et non sur une éventuelle troisième ligne - pour des motifs techniques. Mais ça reste une hypothèse.
Quoi qu'il en soit, à l'examen attentif, ce qui frappe surtout c'est la qualité de finition. Je n'ai ainsi retrouvé sur aucun des Kropp7 l'effet de miroir en triangle que l'on peut remarquer dans le montage comparatif ci-dessous qu'il est beau :
qui constituerait dès lors une manière de signature ? Car elle n'est pas habituelle non plus sur les autres productions de la C. Myers & Son, tous modèles et époques confondus8.
Les stries de prise en main, tant inférieures que supérieures, sont quant à elles d'une régularité sans faille sur toute leur longueur. Mais hélas, ça non plus ne veut pas dire charrette : si les années '20 sont souvent retenues pour dater l'apparition de ce niveau de finition, on rencontre des CC antérieurs aussi bien servis et, surtout, des factures postérieures bien plus bâclées.
Notons aussi que la lame du Myers est plus courte de ~ 5 mm. tandis que le poids global est, quant à lui, supérieur de ~ 10 gr.
Autre indication, parmi les productions que j'ai pu visualiser il en est portant la mention hand forged (…) en lieu et place du made and ground (…) Il est permis de penser que la seconde s'est imposée avec l'obtention de la sous-traitance du Kropp.
Au bout du compte, si je veux la jouer ceinture, bretelles et corde à ballot : faute de source primaire et d'élément datant à coup sûr, force est de situer la manufacture de ce nouveau Sheffie à l'écurie dans une large marge comprise entre 1914 et 1977. Ce qui équivaudrait, en fait, à ne pas le dater...
Mais si je me contente d'un bonne ceinture, bien que le vendeur - qui est une boutique spécialisée de Londres ayant pignon sur rue - le place dans les années '20 je serai pour ma part plus circonspect, en le situant plutôt dans la période charnière pour l'entreprise qu'auront été les années '30. Suffisamment d'éléments concordent pour y inciter, avec les réserves qui s'imposent, sans faire preuve d'une coupable légèreté me semble-t-il.
À l'usage, ce Sheffie NOS venu d'Angleterre est tel qu'il se doit : c'est vraiment un excellent rasoir, en dépit d'une sous-cote sur le marché qui m'arrange bien. La coupe est franche et, après une petite reprise sur coticule / toile / cuir, toute en douceur. Très, très, agréable à utiliser.
Voilà voilà : je crois qu'on a fait le tour. Et vais bien entendu conclure comme d'habitude en rappelant qu'en dépit des croisements de sources et autres vérifications revérifiées, des erreurs peuvent s'être subrepticement glissées dans cette manière d'étude. Si vous deviez en repérer l'une ou l'autre, n'hésitez pas à me le signaler.
En espérant vous avoir apporté quelque chose, je vous remercie pour votre attention et vous donne rendez-vous tout prochainement pour l'Histoire de CC du Norton, point médian de la trilogie
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NOTES
1 Contrairement à ce qu'on peut lire sur plusieurs sites / fils de discussion, Osborne, Garrett & Co. ne met pas la clef sous le paillasson en 1923. Peut-être se restructure-t-elle cette année là ; mais quoi qu'il en soit elle va poursuivre des activités jusqu'en ~ 1986
2 Là, les choses ne sont pas claires quant à l'exclusivité puisque sur les semainiers Kropp que j'ai pu découvrir on lit systématiquement un pluriel - Kropp Manufacturing Co's - qui pourrait indiquer un ensemble de compagnies sous-traitant une fabrication sous licence. Il est toutefois consensuel d'affirmer que Myers aura, en tout cas, été le dernier fabricant du Kropp. Le genre de chose qu'il faudra(it) creuser dans une étude consacrée spécifiquement au Kropp.
3 Qui est toujours restée semble-t-il propriété d'Osborne, Garrett & Co. comme tendrait à en attester une photo visible sur la banque d'images Alamy et prise à Londres ( Soho ) en 1972, où l'on découvre une plaque de façade annonçant : « Proprietors of the world famous Kropp razor ». Soho où est implanté le siège d'OG & Co. ( frith street 51 - 55 ). Relevons qu'en l'occurrence il est bien question de propriétaire et non de fabricant.
4 Ce genre d'association n'était pas exceptionnel, les produits portant la marque du fabricant bénéficiant alors du réseau de distribution de son commanditaire.
5 L'analyse des publicités - depuis toujours à prendre avec des pincettes, mais... - permet d'y voir apparaître, a partir de cette date, une mention : « the hand made of a master cutler » beaucoup plus restrictive que les « english manufacture » et autre « all british » exclusivement en vigueur jusque là.
6 Le made and ground in Sheffield Eng. est un peu ambigu, en ce sens qu'il peut avoir anticipé la nouvelle règle sans le vouloir, par simple volonté commerciale de se démarquer des ground in Hamburg et made in Sheffield, ground in Hamburg antérieurs. Ceci dit, on a vu que 1914 reste une date fort crédible à ce niveau également.
7 Je n'en ai guère visualisé que qu'une grosse centaine, il est vrai…
8 … c'est là que le gars se surprend à rêver qu'il possèderait peut-être bien une rare lame passée par les mains de Charlie Myers himself...
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